Les droits du suspect pendant l’enquête et l’instruction.
- En cas d’arrestation par la police :
Dans quels cas et combien de temps puis-je être privé de liberté par la police ?
Vous pouvez être privé de liberté en cas de flagrant délit ou crime, ou sur demande du procureur du Roi ou du juge d’instruction lorsqu’il existe des indices sérieux de culpabilité. La privation de liberté par la police ne peut en principe pas dépasser 24 heures. Toutefois, en cas de circonstances particulières motivées par le juge d’instruction, ce délai peut être prolongé une seule fois, par ce dernier pour un délai complémentaire d’un maximum de 24 heures. En cas de non-respect de ces délais, vous devez être libéré immédiatement.
Puis-je être fouillé? Oui, lors de votre arrestation ou s’il existe des raisons de croire que vous portez une arme ou un objet dangereux, ou si l’ordre public est menacé.
La police peut-elle entrer chez moi ? Oui, en cas de flagrant délit ou avec votre consentement.
Peut-on fouiller mon bureau, ma voiture ? Oui, comme pour votre domicile. Cependant certains lieux sont inviolables et d’autres sont spécialement protégés : leur fouille impose une procédure particulière (bureau d’un diplomate, d’un parlementaire, lieux appartenant à des dépositaires du secret professionnels,…) Votre voiture peut être fouillée s’il existe des raisons de croire qu’elle a servi à commettre une infraction, à transporter des personnes recherchées, des pièces à conviction ou éléments de preuve, ou des objets dangereux pour l’ordre public.
Puis-je contacter une personne de confiance ? Un proche de votre choix peut être prévenu de votre arrestation par l’intermédiaire du policier sauf si le magistrat en décide autrement en raison d’un risque de fuite préjudiciable à l’enquête. Si vous êtes mineur, le policier est obligé d’informer vos parents, votre tuteur, ou la personne qui s’occupe de vous dans les meilleurs délais.
Ai-je droit à une assistance médicale ? Oui sans exception.
Quels sont mes droits lors de mon audition par la police ? • Le droit d’être informé de la possibilité de quitter les lieux si la police ne vous a pas averti que vous étiez privé de votre liberté. • Une déclaration écrite de vos droits doit vous être remise avant le début de l’audition. • Au début de toute audition, un résumé des faits sur lesquels vous serez interrogés vous sera communiqué. • Avant d’être interrogé, vous avez le droit de vous concerter pendant au minimum 30 minutes, confidentiellement avec un avocat de votre choix ou désigné, si vous en connaissez pas. Si vous êtes privé de votre liberté, votre avocat peut assister à l’audition. Cette assistance juridique ne peut vous être ôtée que si vous y renoncez ou si le magistrat le décide en motivant son choix sur des circonstances impérieuses. Cependant, les honoraires de cet avocat sont à votre charge sauf si vous ne disposez pas des ressources suffisantes pour le payer. • Vous ne pouvez être contraint à vous accuser vous-même. • Vous avez le droit de vous taire et de ne pas vous incriminer, c'est-à-dire de ne pas collaborer à la production de preuves contre vous. • vous pouvez demander que toutes les questions qui vous sont posées et les réponses que vous y apportez soient actées dans les termes utilisés ; • vous pouvez demander qu'il soit procédé à tel acte d'information ou telle audition; • Vous pouvez utiliser les documents en votre possession, sans que cela puisse entraîner le report de l'interrogatoire. Vous pouvez, lors de l'interrogatoire ou ultérieurement, exiger que ces documents soient joints au procès-verbal d'audition ou déposés au greffe. • À la fin de l'audition, le procès-verbal vous est donné en lecture. Il vous est demandé si vos déclarations ne doivent pas être corrigées ou complétées. • Si vous souhaitez vous exprimer dans une autre langue que celle de la procédure, vous pouvez faire choix d’une autre langue, ce qui doit être acté par le policier. Il est alors fait appel à un interprète assermenté, il est pris note de vos déclarations dans votre langue, ou il vous est demandé d’écrire vous-même votre déclaration. Si l'interrogatoire a lieu avec l'assistance d'un interprète, son identité et sa qualité sont mentionnées. Si ce choix porte sur le français, le néerlandais ou l’allemand, il devra être pris en compte pour déterminer la langue utilisée par les magistrats et juges qui suivront le dossier en justice. • Une copie de votre audition peut vous être délivrée gratuitement.
Demandera-t-on des informations sur mon casier judiciaire ? Les services de police ont accès au casier central ainsi qu’à d’autres banques de données judiciaires reprenant l’ensemble des dossiers ouverts contre vous.
- Dans le cadre d’une information à ma charge menée par le parquet du procureur du Roi L’enquête est menée par le procureur du Roi. L’information préliminaire est de caractère inquisitoire : secrète, écrite et non contradictoire.
Que peut faire le procureur du Roi pendant la phase d’information ? Sauf exceptions légales, les actes d’information ne peuvent comporter aucun acte de contrainte ni porter atteinte aux droits et aux libertés individuels. Les saisies de biens sont possibles sous certaines conditions. Le procureur du Roi peut, entre autres: • descendre sur les lieux des faits, • vous entendre dans les mêmes conditions que celles prévues à la police, • entendre ou faire entendre par la police des suspects, témoins, • faire arrêter quelqu’un (hors flagrant délit) pendant 24 heures, • faire procéder à une analyse ADN avec accord du suspect, • intercepter et saisir le courrier (mais pas l’ouvrir), • obtenir selon certaines conditions des informations bancaires, • procéder à des perquisitions en cas de flagrant délit ou avec le consentement de la personne ayant la jouissance effective du lieu, • faire procéder à des méthodes particulières de recherche pouvant être très intrusives.
Que puis-je faire si un acte d’information lèse mes droits ? Vous pouvez en demander la levée par une requête motivée, le référé pénal, par exemple si vos biens sont saisis en tant que pièces à conviction. Dans les 15 jours, le procureur du Roi devra se prononcer. En cas d’absence de réponse ou de réponse négative, vous pouvez introduire un recours devant la chambre des mises en accusation. Vous pouvez également, dans ce cas, demander au procureur du Roi d’autoriser l’Organe central pour la saisie et la confiscation à vendre le bien, ou à le restituer en échange d’une caution.
Puis-je avoir accès au dossier ? Contrairement à au régime de l’instruction, aucune règle particulière n’organise la communication totale ou partielle du dossier aux parties en cause au stade de l’information. Vous pouvez solliciter l’accès au dossier auprès du procureur du Roi qui dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour accepter ou refuser.
Puis-je influer sur le sort du dossier ? Non. Le procureur du Roi prendra seul la décision de classer sans suite, saisir un juge d’instruction, vous citer ou vous convoquer par procès-verbal devant le tribunal de fond, ou vous proposer un mode alternatif d’extinction de l’action publique (transaction ou médiation : dans ce cas, il n’y aura pas de procès si vous payer l’amende ou si vous respecter les conditions imposées lors de la médiation).
- Lorsqu’un juge d’instruction a été chargé de l’enquête L’instruction est conduite sous la direction et l’autorité du juge d’instruction, saisi par le procureur du Roi, ou la victime supposée d’une infraction via une plainte avec constitution de partie civile.
Quels sont les actes qu’un juge d’instruction peut poser ? Il peut user de tous les actes dont peut faire usage le procureur du Roi, et de moyens de contrainte importants : décerner un mandat d’arrêt, faire procéder à des écoutes téléphoniques, des perquisitions sans consentement, des méthodes particulières de recherche encore plus étendues,…
Dois-je être entendu par le juge d’instruction? L’interrogatoire par le juge d’instruction n’est obligatoire qu’en cas de délivrance d’un mandat d’arrêt (voir les conditions de celui-ci infra). La présence de votre avocat est possible lors des interrogatoires du juge d’instruction sauf si ce dernier s’y oppose pour des raisons impérieuses en cas de circonstances particulières du dossier. Elle est obligatoire en cas de descente sur les lieux en vue de la reconstitution des faits.
Le juge doit-il me signaler qu’un dossier existe ? Le juge doit en principe vous inculper s’il existe des indices sérieux de culpabilité contre vous. L’inculpation a lieu après une audition ou par courrier, et vous rend titulaire du droit de solliciter l’accès au dossier répressif et du droit de demander des mesures d’instruction complémentaires.
Le juge peut-il me placer sur écoutes téléphoniques ? Oui, en respectant des conditions légales très précises.
Puis-je m’opposer à une perquisition ? Votre domicile peut être perquisitionné si un mandat de perquisition a été signé par le juge, et si la perquisition se déroule entre 5 heures et 21 heures, sauf exceptions.
Le juge peut-il me contraindre physiquement à un prélèvement d’ADN ? Oui, sous certaines conditions.
Que puis-je faire contre un acte d’instruction qui lèse mes droits ? Vous pouvez vous y opposer par une requête (voir le « référé pénal » supra).
Puis-je avoir accès au dossier pendant l’enquête ? Si vous êtes inculpé non détenu, vous pouvez solliciter l’accès au dossier par une requête adressée au juge d’instruction, qui peut refuser l’accès mais doit motiver son refus. En cas de silence du juge ou de réponse négative, un recours vous est ouvert devant la chambre des mises en accusation.
Puis-je demander l’accomplissement de certains actes d’instruction ? Oui, que vous soyez ou non détenu. Vous pouvez le sollicitez par requête. Le juge d’instruction peut le refuser s’il estime la mesure non indispensable à la manifestation de la vérité ou préjudiciable à l’instruction. Une possibilité d’appel existe.
- Le cas particulier de la détention préventive
Comment doit se passer l’interrogatoire devant le juge ? Un interrogatoire préalable à la délivrance d’un mandat d’arrêt doit avoir lieu dans les 24 heures de la privation de liberté sous peine de nullité du mandat d’arrêt. L’interrogatoire doit porter notamment sur la possibilité de délivrance d’un mandat et sur les faits reprochés. Votre avocat, préalablement informé des faits qui vous sont reprochés, peut y assister sans intervenir dans les réponses que vous donnerez.
Quel est le rôle de mon avocat devant le juge d’instruction au moment de cet interrogatoire ? L’avocat n’a pas la possibilité de lire le dossier répressif à ce stade de la procédure. Cependant, le magistrat a l’obligation de l’informer des faits au sujet desquels a lieu l’audition avant que ce dernier ne s’entretienne confidentiellement avec vous pour être en mesure de donner le meilleur conseil. Il doit contrôler du respect de vos droits au cours de l’audition, de contrer l’exercice manifeste de pressions ou contraintes illicites et peut faire acter des observations au procès-verbal à ce sujet en fin d’audition. Il peut demander une interruption de quinze minutes en cours d’audition pour s’entretenir confidentiellement avec son client. Il a également la possibilité d’exprimer des remarques ou des suggestions en vue de vous éviter d’être placé en détention préventive par la proposition d’alternatives telles que la mise en liberté sous conditions… Cette assistance juridique ne peut vous être ôtée que si vous y renoncez ou si le magistrat le décide en motivant son choix sur des circonstances impérieuses.
Puis-je être entendu par le juge par la suite ? Oui, en présence de votre avocat, si vous le souhaitez sauf si le juge d’instruction s’y oppose en cas circonstances particulières et graves.
Quand puis-je parler à mon avocat en toute confidentialité ? Avant d’être interrogé par le magistrat, vous avez le droit de vous concerter confidentiellement avec votre avocat sur place ou par téléphone et ce, pendant 30 minutes (ou plus - en cas de circonstances exceptionnelles). En cours d’audition, vous pouvez également demander une interruption pour parler à nouveau à votre avocat en tête à tête. Si vous ne parlez pas la même langue que votre conseil, la présence d’un interprète est autorisée. Les déclarations que vous feriez sans avoir pu en discuter au préalable avec un avocat ne pourraient pas être utilisées même partiellement pour vous considérer comme coupable de ce qu’on vous reproche. Après le premier interrogatoire du juge d’instruction, l’accès à votre avocat est possible sans restriction. Si vous êtes détenu, il s’organisera au sein de la maison d’arrêt. Les honoraires de l’avocat et de l’interprète sont à vos frais sauf si vous disposez de ressources insuffisantes pour les financer.
Puis-je contester la légalité ou les motifs du mandat d’arrêt ? Vous ne pouvez pas interjeter appel de la décision de placement sous mandat d’arrêt. Dans les cinq jours de la délivrance du mandat, vous comparaîtrez devant la chambre du conseil. La veille, vous aurez eu accès à votre dossier. Votre avocat ou vous-même pourrez solliciter votre remise en liberté. Votre avocat pourra soulever une irrégularité du mandat seulement lors de cette première comparution devant la chambre du conseil (et en appel). Si le mandat d’arrêt est confirmé, vous disposez d’un droit d’appel. Vous comparaitrez devant la chambre des mises en accusation dans les 15 jours. En cas de non-respect de ces délais, vous serez immédiatement remis en liberté. La confirmation de la détention vaut pour un (ou trois) mois. Vous pourrez, à chaque audience, contester l’opportunité du mandat d’arrêt et/ou les indices sérieux de culpabilité. Le dossier sera à votre disposition deux jours avant chaque comparution.
Puis-je communiquer avec des tiers en prison ? Vous pouvez toujours communiquer avec votre avocat. Par contre, le juge d’instruction peut vous interdire de communiquer avec toute autre personne pendant maximum trois jours.
Quand puis-je être remis en liberté ? À tout moment par le juge d’instruction, ou sur décision des juridictions d’instruction lors de votre comparution. Une libération peut avoir lieu sous conditions ou caution.
- A la fin de l’enquête menée par le juge : la clôture de l’instruction
Que puis-je faire si l’enquête traîne ? Après une année, vous pouvez saisir par requête motivée la chambre des mises en accusation qui contrôlera le déroulement de l’enquête.
Les chefs d’accusation/d’inculpation peuvent-ils être modifiés avant le procès? Le procureur du Roi lit le dossier communiqué par le juge et libelle les préventions desquelles l’inculpé devra selon lui répondre devant le tribunal. Il peut également prendre des réquisitions de non-lieu, ou encore demander au juge d’effectuer certains devoirs d’enquête supplémentaires. La qualification pénale peut encore être changée par le procureur du Roi à cette occasion, ou par la chambre du conseil qui décide du sort du dossier.
Puis-je plaider coupable avant le procès sur tous les chefs d’accusation/d’inculpation ou certains d’entre eux? Non, vous êtes présumé innocent jusqu’à votre condamnation définitive par une juridiction de fond.
Comment se passe la clôture du dossier ? La chambre du conseil décide après avoir entendu le rapport du juge d’instruction, l’éventuelle partie civile, le procureur et la défense: • de renvoyer l’inculpé devant la juridiction compétente; • de prononcer le non-lieu; • d’octroyer la suspension du prononcé : les faits sont déclarés établis, mais aucune peine n’est prononcée. Le juge fixe un délai de mise à l’épreuve, pouvant être assorti de conditions à respecter; • d’appliquer la loi de défense sociale (internement).
Quels sont mes droits lors de cette phase ? Vous pouvez lire votre dossier et lever copie de pièces avant l’audience devant la chambre du conseil. Vous pouvez également solliciter des devoirs d’enquête complémentaires par requête. Si le juge d’instruction refuse de les exécuter, vous disposer d’un droit de recours devant le chambre des mises en accusation.
Puis-je interjeter appel ? Vous ne pouvez pas interjeter appel d’une ordonnance de renvoi, sauf en cas d’irrégularité, d’omission ou de cause de nullité affectant un acte d’instruction, l’obtention de la preuve ou relative à l’ordonnance de renvoi, si vous invoquez une cause d’irrecevabilité ou d’extinction de l’action publique.